Lutte anti-tabac au Bénin: Entre défaut d’audace et le carcan des accords commerciaux

(Le puissant lobby des industries du tabac plombe les efforts)

Que de campagnes, projets, programmes et initiatives de lutte contre le tabac à travers le monde. Au Bénin, des actions foisonnent et fusent de toutes parts pour contribuer à cette lutte dont la finalité est de sauver des vies. La communauté internationale en a fait une préoccupation majeure au point d’instituer chaque 31 mai, la Journée mondiale sans tabac. Seulement les discours et actions semblent loin de refléter l’engagement projeté dans cette lutte…

 

Dans presque tous les coins de rue, les produits du tabac sont accessibles au grand public. A Dégakon, quartier du premier arrondissement de Cotonou, des points de vente de cigarettes sont perceptibles dans la plupart des rues. Samson (nom d’emprunt), jeune élève vient de s’en procurer un paquet. Pour son frère ainé, a-t-il confié au départ avant d’avouer finalement qu’il allait fumer avec un autre camarade de classe. Ignore-t-il qu’il s’agit d’une denrée mortelle ? Pour le jeune Samson, cela relève d’une campagne contre le tabac arguant que son oncle qui fumait plus d’un parquet au quotidien, est décédé d’un cancer de poumon qui, selon lui n’avait rien à voir avec la cigarette.

Comme Samson, ils sont nombreux, jeunes comme adultes ou encore enfants, à développer une certaine dépendance vis-à-vis des produits du tabac. Du coût à la disponibilité du tabac, tout semble militer en faveur de la commercialisation et de la consommation du tabac. Et ceci, malgré la menace sanitaire que représente le tabac.

Le tabac : le produit “légal“ qui tue…

Le tabac reste un produit légal et n’est donc pas interdit de consommation. Des conventions internationales ratifiées par le Bénin à l’arsenal juridique adopté au plan national, aucune disposition ne proscrit à ce jour, la commercialisation, la production et la consommation du tabac. Véritable paradoxe ! Et ceci, malgré la menace réelle que constitue le tabac non seulement pour les consommateurs et leur environnement immédiat mais aussi pour l’Etat. Et il se révèle que peu importe la recette fiscale qui en découle pour les Etats, elle est « complétement détruite par l’investissement qui sera fait par les personnes qui seront atteintes par les maladies liées au tabac“, admet Inoussa Saouna, secrétaire permanent de l’Observatoire de lutte contre le tabac en Afrique francophone (Otaf) et Président SOS tabagisme Niger, membre du Conseil d’administration de l’Alliance contre le tabac en Afrique.

Mais pourquoi combattre un produit légal et en vente légale ? En effet, le tabac reste un produit toxique et dépendogène. “Les études scientifiques, preuves à l’appui, ont démontré que la cigarette contient plus de quatre milles substances toxiques dont plus de cinquante-deux sont cancérigènes et au-delà de l’aspect cancérigène de ces produits, il n’y a pas une dose de tabac qui ne soit nocive pour la santé d’une personne qui en fait usage“ souligne le Directeur exécutif de l’Ong Initiative pour l’éducation et le contrôle du tabagisme (Iect), Augustin Faton.

Le tabac n’est plus seulement un facteur de risque pour les maladies chroniques mais plutôt une cause directe de la plupart des cancers, admet Dr Judith Segnon, médecin de santé publique, épidémiologiste, Point focal/Lutte contre le tabac au ministère de la santé. “C’est un fléau. Il n’y a rien de bon dans le tabac sous toutes ses formes. Que ce soit marché, chiqué, fumé, tout est mauvais. Surtout dans la fumée du tabac il y a plus de sept milles substances toxiques dont une soixantaine sont des substances cancérigènes“ alerte-t-elle. Selon la Fondation contre le cancer, le tabac est responsable de 30 % des décès par cancer et de 85% du cancer du poumon. Au Bénin, la prévalence chez les adultes est de 16% et 9,2% chez les adolescents avec une prévalence de 25,2% chez les garçons et 6,7% chez les filles. Si la prévalence est de 18,9% chez des personnes n’ayant aucun niveau d’instruction, au niveau universitaire, elle est de 4,0%.

Le tabac se révèle donc être une véritable menace sanitaire au regard non seulement de sa composition toxique mais surtout des conséquences sur le bien-être des consommateurs. Pour beaucoup, il est quasiment incompréhensif qu’un tel produit soit déclaré légal et rendu accessible au grand nombre.

Le tabac accessible malgré l’arsenal juridique…

Au niveau national comme international, des dispositions sont prises pour renforcer la lutte anti-tabac. La Convention cadre de l’Organisation mondiale pour la santé pour la lutte anti-tabac est d’ailleurs citée comme une référence. Ratifiée par le Bénin, la présente convention, élaborée à la suite de la mondialisation de l’épidémie de tabagisme, donne la priorité à la protection de la santé publique. Selon le document, l’objectif de la Convention et de ses protocoles est de protéger les générations présentes et futures des effets sanitaires, sociaux, environnementaux et économiques dévastateurs de la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée du tabac.

Alors qu’aucune disposition de la présente convention n’interdit la production, la commercialisation ou encore la consommation du tabac, elle laisse toutefois la possibilité aux Etats de prendre les mesures restrictives les plus sévères y compris même au-delà des dispositions de la Convention et de ses protocoles (article 2). Ceci, pour mieux protéger la santé humaine.

Outre la Convention-cadre de l’Oms, le Bénin a également ratifié le protocole pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac en 2018. Plus important, en 2017, le Bénin a adopté le 14 septembre 2017 et promulgué le 18 décembre 2017, la loi 2017-27 relative à la production, au conditionnement, à l’étiquetage, à la vente et à l’usage du tabac, de ses dérivés et assimilés en République du Bénin. Comportant 47 articles, la présente loi offre un cadre juridique pour la mise en œuvre des mesures de lutte anti-tabac, crée des conditions pour l’organisation de la lutte et contribue à la “dé-normalisation“ de l’usage du tabac, de ses dérivés et assimilés.

Une grande avancée, selon Dr Judith Sègnon. A l’en croire, la loi encadre et interdit de fumer dans les lieux  à usage collectif fermé, interdit toute publicité autour des produits du tabac. “Il est interdit également de commercialiser le tabac à Cinq cents mètres des écoles et centres d’apprentissage. On ne doit pas banaliser le tabac et mettre les produits de tabac sur des étalages avec les bonbons, les biscuits pour les rendre accessibles au grand public et surtout aux enfants…Il est également interdit de vendre la cigarette aux mineurs et par les mineurs“ précise-t-elle.

Si le Bénin peut se targuer de disposer d’une loi moderne, intégrant les bonnes pratiques au niveau international, l’application est loin d’être effective, déplore Augustin Faton de la Coalition des organisations de la société civile engagées dans la lutte anti-tabac. Selon cet acteur de la société civile, des décrets et arrêtés d’application de la loi traînent toujours et il urge d’agir au regard des dégâts liés au tabagisme.  Toute chose qui apparaît comme l’une des faiblesses du dispositif de lutte, précise Inoussa Saouna du SOS Tabagisme Niger.

Ce que reconnaît Dr Judith Segnon, Point focal de la lutte anti-tabac au ministère de la santé même si un décret et un arrêté d’application de ladite loi ont tout de même été pris. L’institutionnalisation de la lutte à travers la création d’un office anti-tabac pour conduire la lutte contre le tabagisme au Bénin est fortement recommandée par la société civile.

Toutefois, elle insiste sur le fait que l’application de tous les articles de la loi ne nécessite pas la prise d’un décret. A titre illustratif, elle affirme que l’interdiction de fumer dans les lieux à usage public fermé ne nécessite pas forcément un décret avant d’être en vigueur. Par ailleurs, la méconnaissance des dispositions de la loi reste également l’une des faiblesses de la lutte contre le tabac au Bénin.

Le véritable hic est que le tabac semble toujours très accessible au grand nombre malgré cet arsenal juridique. En effet, de la Convention-cadre à la loi 2017-27, aucune disposition n’érige de barrière à la consommation du tabac. La disponibilité demeurant garantie, le tabac ne fait que des ravages.

L’interdiction : l’audace qui manque face aux lobbys…

Le Bénin, à l’instar des autres pays, a-t-il les mains liées dans cette lutte ? En effet, de nos investigations, il est très difficile de retrouver les traces d’un pays qui, au regard du caractère nocif et dangereux du tabac, ait décidé d’interdire la commercialisation et de la consommation du tabac sur son territoire. Si selon Dr Judith Sègnon, un pays (une île d’une petite superficie) l’a fait, la plupart des Etats, sous le couvert des accords commerciaux internationaux, se refusent encore cette option.

Ce que reconnaît d’ailleurs le Point focal de la lutte anti-tabac au ministère de la santé qui trouve qu’il serait difficile de se dresser radicalement contre le tabac.  “…c’est des lobbys très forts à des niveaux très élevés jusqu’au niveau de l’Organisation mondiale du commerce“ admet-elle. Des lobbys qui font du tabac, une drogue licite autorisée à la consommation. Sa production ainsi que sa commercialisation ne sont donc pas interdites.

“Nous sommes dans un contexte international, le Bénin est engagé par les accords commerciaux et tout ça lie les mains de l’Etat, lie les pouvoirs publics à un certain nombres d’accords“ argue Augustin Faton. Selon l’acteur de la société civile, passer à l’interdiction pourrait engendrer d’autres problèmes. Et à Dr Sègnon Judith d’ajouter que “…l’Etat peut interdire mais c’est une volonté politique. Tenez-vous tranquille, les firmes du tabac ne vont pas vous coller la paix, c’est des lobbys très forts, ils vont vous assigner devant les juridictions“. Par ailleurs, tous restent unanimes sur les efforts consentis face à un adversaire de taille, l’industrie du tabac.

Face à ce qu’il convient d’appeler “fatalité“, la seule marge que semble exploiter le Bénin comme d’autres pays, reste la règlementation de la consommation. A ce niveau encore, les mesures sont encore loin d’être dissuasives.

De la convention-cadre de l’Oms à la loi anti-tabac au Bénin, les directives convergent plutôt vers la réduction de la demande ainsi que la réduction de l’offre. Une approche qui peut bien, à défaut de l’interdiction, se révéler efficace, selon Inoussa Saouna, secrétaire permanent de l’Observatoire de lutte contre le tabac en Afrique francophone (Otaf). “…il faut agir sur l’offre et sur le revenu du consommateur et ensuite, il faut créer un environnement de restrictions…il faut agir sur un mécanisme pour amener les fumeurs à ne pas fumer, les jeunes à ne pas s’engager dans la consommation du tabac…On ne va pas assister du coup à la disparition du tabac mais nous allons assister à une réduction de la consommation. Et progressivement une perte de revenus pour l’industrie qui va vouloir investir ailleurs“ fait-il remarquer.

Au Bénin, l’interdiction de consommation du tabac dans les lieux publics ainsi que la vente dans les rayons des établissements scolaires ou encore sanitaires sans oublier l’interdiction de la vente aux enfants sont autant de mesures qui restreignent les marges de manœuvres de l’industrie du tabac, selon Augustin Faton de l’Ong Iect. “Aucun opérateur économique n’ira chercher un bien qui n’est pas demandé par les populations“ martèle-t-il pour souligner la finalité de la stratégie de réduction de la demande et de l’offre.

L’une des mesures préconisées d’ailleurs par l’Oms pour réduire la demande du tabac est relative aux mesures financières et fiscales qui, selon l’Organisation, restent un moyen efficace et important de réduire la consommation du tabac. S’il est évident qu’avec le renchérissement des coûts, chose qui découlera des mesures fiscales, le tabac deviendra moins accessible aux cibles, tout semble indiquer qu’au Bénin, on n’y pense pas encore. “Avec 25Fcfa, tu peux t’offrir une cigarette même deux. Cela dépend de la cigarette que tu choisis“ confie Abdul (nom d’emprunt), jeune fumeur.

« En Afrique, vous pouvez manquer de sucre et de pain, mais pas de cigarettes. Dans les zones les plus reculées il y a presque toujours des points de vente », déplore Daouda Elhadj Adam, secrétaire général de l’association de défense des consommateurs au Tchad dans une publication. Ceci, pour montrer le défaut de mesures ou le défaut d’application des mesures visant à réduire la demande et l’offre du tabac en Afrique.

A cet effet, il faut préciser qu’entre 2011 et 2014, les Etats membres de la Cedeao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) se sont engagés dans un processus de relèvement de la taxe sur le tabac en étroite collaboration avec l’Oms et le Consortium pour la recherche économique et sociale (Cres). Des deux projets de directives élaborés dont celui portant sur la fixation d’un taux de taxe ad valorem au moins égal à 50%, et l’instauration d’une taxe spécifique en plus de la taxe ad valorem. L’industrie du tabac n’est favorable qu’à des augmentations de taxes inférieures à 10%, selon l’Otaf. Des directives approuvées par le Comité technique des experts de la Cedeao en juillet 2014. Seulement lesdites directives ne sont toujours pas en vigueur.

Des acteurs de la société civile au Point focal de lutte anti-tabac du ministère de la santé, tous admettent l’interdiction du tabac comme l’idéal mais la traversée est loin d’être chose aisée. “J’avais toujours encouragé qu’on interdise totalement… cela relève des pouvoirs publics et nous encourageons l’Etat à le faire parce que nos enfants ont besoin de vivre dans un environnement sain. Mais il y a trop de ramifications et je crois que la prudence aussi, ça fait partie de la diplomatie“ se console Augustin Faton.

Quand les accords commerciaux lient les mains aux Etats…

Ce qui semble toutefois évident est que les Etats africains sont conscients de ce que les accords commerciaux représentent des obstacles aux mesures nationales de santé publique et de lutte contre le tabagisme. Déjà en 2019, à la faveur d’un Atelier multi-pays sur le droit international du commerce et l’investissement et la lutte antitabac,  des Etats membres francophones de la région africaine de l’Organisation mondiale de la santé (Oms) se sont mobilisés pour faire prévaloir les enjeux sanitaires sur les accords commerciaux.

Si cette rencontre de haut niveau a permis de sensibiliser les conseillers juridiques et judiciaires des gouvernements aux accords internationaux de commerce et d’investissement et surtout de mener des réflexions sur comment juguler les manœuvres de l’industrie du tabac qui freinent et nuisent aux efforts des pays à travers des actions judiciaires contre les Etats, des actes et actions matérialisant cette prise de conscience peinent à être perceptibles.

Nul doute que ces accords commerciaux servent de bouclier à l’industrie du tabac qui n’hésitent pas à trainer les Etats devant les juridictions internationales chaque que des dispositions sont envisagées pour protéger contre le tabac. Des actions judiciaires que l’industrie du tabac perdent généralement, selon Dr Judith Sègnon. A l’en croire, il s’agit des manœuvres pour freiner l’élan des gouvernements notamment avec le temps que prennent ces actions en justice. Plusieurs pays ont été déjà assignés en justice par des industries du tabac notamment Philip Morris.

Alors que le régime mondial du commerce est pointé du doigt, les accords bilatéraux d’investissement sont perçus comme des outils de la mondialisation qui restreignent la souveraineté des Etats. Cependant, les accords commerciaux les plus mis en cause dans cette lutte anti-tabac sont entre autres, l’Accord les Obstacles techniques au commerce (OTC), l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT).

Les industries du tabac : une influence incoercible…

En effet, les industries du tabac se révèlent être une véritable gangrène au cœur de la lutte. Des témoignages recueillis, il ressort que les industries du tabac flairent tous les sentiers, toutes les initiatives susceptibles de constituer une menace à leur business. Il n’est donc pas rare que les responsables réussissent à imposer leurs idées dans l’élaboration des politiques visant à combattre le tabac.

Plus inquiétant, ces industries de tabac usent d’une stratégie assez connue des acteurs de la société civile pour faire diversion et détourner les Etats du but, selon des témoignages. En fait, il n’est pas rare de voir les industries du tabac initier et financer des ateliers de formation des acteurs impliqués dans la lutte. Si l’objectif affiché est de contribuer à la lutte contre le commerce illicite du tabac, la finalité est de “tromper les  autorités dans la prise de décisions fortes qui contrarient leurs profits“, fait savoir Inoussa Saouna.

A titre illustratif, alors que la Cedeao était engagée dans un processus d’adoption et de mise en œuvre des directives portant sur la fixation d’un taux de taxe ad valorem au moins égal à 50%, et l’instauration d’une taxe spécifique en plus de la taxe ad valorem, une interférence de l’industrie du tabac a été dénoncée. Il s’agit, selon l’Otaf, de la société multinationale British American Tobacco (BAT) à qui, il est reproché, “une campagne agressive de désinformation, d’intimidation et de chantage auprès des gouvernements de la communauté“.

Dans une série de communiqués en référence à des ateliers de l’industrie du tabac à Cotonou, ce dernier a d’ailleurs dénoncé les machinations de l’industrie du tabac au Bénin. En février 2022, des ateliers ont été effectivement organisés à Cotonou, Parakou et Abomey “pour outiller les différents acteurs impliqués dans la lutte anti-tabac au Bénin“  notamment les magistrats, les Officiers de police judiciaire (Opj), douaniers, les représentants du ministère de l’industrie et du Commerce. L’initiative émane de “l’Industrie Légale du Tabac“, selon le site officiel du gouvernement. Et cette industrie légale pourrait bien être la Société nationale des tabacs et allumettes du Mali (Sonatam).

Les multinationales du tabac, British American Tobacco (BAT), Imperial Tobacco (IT) et Philip Morris International (PMI) sont aussi régulièrement citées comme coutumières de ces pratiques.

Des assises, dont les travaux se sont uniquement préoccupés des conséquences sécuritaires et économiques du commerce illicite du tabac. Les conséquences sanitaires du tabac, produit légal, semblent ne pas préoccuper. Et pourtant, la Convention-cadre de l’Oms stipule clairement en son article 5 qu’en “définissant et en appliquant leurs politiques de santé publique en matière de lutte Anti-tabac, les Parties veillent à ce que ces politiques ne soient pas influencées par les intérêts commerciaux et autres de l’industrie du tabac, conformément à la législation nationale“.

En référence à cette disposition de la Convention-cadre, l’Oms a d’ailleurs rejeté en mars 2022, le vaccin Covifenz de Medicago du fait de ses liens avec le géant du tabac, Philip Morris. Une décision brandie par la société civile pour exhorter tous les gouvernements à rejeter les partenariats avec les fabricants de tabac

Des rapports et publications consultés, il se révèle que l’industrie du tabac est destructrice d’emplois au niveau national, qu’elle coûte au gouvernement plus qu’elle ne rapporte, qu’elle est nocive pour l’économie des pays, et engendre l’appauvrissement des populations qu’elle a réussi à enchaîner dans la dépendance à son produit. “L’industrie du tabac est la seule qui a pu manipuler l’humanité en rendant légal le seul produit au monde qui tue un sur deux de ses consommateurs“ alerte Inoussa Saouna.

Une lutte en quête de financement…

La lutte anti-tabac, malgré son importance au regard de l’urgence des actions, semble ne pas recevoir l’onction de plusieurs partenaires techniques et financiers. Conséquence, très peu de ressources sont injectées dans la lutte. Très peu de partenaires techniques et financiers investissent dans la lutte anti-tabac y compris la Banque mondiale, déplore le Point focal de la lutte au ministère de la santé. Selon nos investigations, la Convention-cadre de l’Oms n’a toujours pas été ratifiée par les Etats-Unis d’Amérique. Une source de ressources en moins dans ladite lutte ?

Au plan national, la lutte souffre également d’un défaut de financement. Pour le secrétaire permanent de l’Observatoire de lutte contre le tabac en Afrique francophone (Otaf), la question est souvent négligée sur le plan budgétaire.  “C’est devenu pratiquement une activité des organisations de la société civile“ déplore Inoussa Saouna qui plaide pour une ligne budgétaire en faveur de la lutte anti-tabac.

Saisies par courrier dans le cadre de la présente enquête, les directions générales des douanes et de la police républicaine n’ont pas daigné répondre à nos préoccupations. Toutes nos tentatives pour entrer en contact avec quelques industries du tabac notamment la Sonatam, British American Tobacco (BAT), et Philip Morris International sont restées vaines notamment du fait de la non-disponibilité d’adresse mail sur leur site internet. Les personnes ressources contactées ont confié ne pas pouvoir nous mettre en contact avec ces compagnies.

Selon l’Association médicale mondiale (Amm), plus de 80 % des 1,3 milliards de fumeurs à travers le monde vivent dans des pays à revenu faible ou moyen. Le tabac tue environ 8,7 millions de personnes chaque année, et coûte par ailleurs près de 1 400 milliards de dollars US en dépenses de santé et en baisse de la productivité des travailleurs. Le tabac tuera un milliard de personnes au cours du 21e siècle à moins d’une intervention efficace, selon l’Amm.

 

Aziz BADAROU

Source : Matin Libre

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