Eligibilité de Talon en 2026: Attention ! la Constitution ouvre une brèche

Des dispositions contradictoires sur le nombre de mandat

 La Cour doit clarifier au plus tôt

L’actualité politique en vogue aujourd’hui au Bénin est entre autres, la participation ou non du président TALON à la prochaine élection présidentielle de 2026. Cette polémique est le plat de résistance de tous les jours, et il en sera ainsi encore jusqu’en 2026 si, entre-temps des clarifications ou des modifications de certaines dispositions de la constitution n’ont pas été faites par le législateur ou le juge constitutionnel.

En effet, beaucoup de débats, d’encre et de salive tant dans les médias radios et télévisions que sur les réseaux sociaux continuent d’alimenter la vie politique au Bénin sur l’éligibilité du candidat Patrice TALON en 2026 pour briguer un autre mandat. Il est important de rappeler que dans un pays démocratique, les textes fondamentaux que sont la Constitution, la charte des partis politiques et le code électoral, bien pensés, bien rédigés et sans ambigüité, sont le socle de la paix, du développement et de la stabilité politique. En un mot, tout dépend de la qualité de ces textes dont l’exclusivité de l’initiative est confiée dans notre pays au gouvernement et à l’Assemblée Nationale (article 57 de la Constitution). Pour les observateurs avertis de la vie politique de notre pays, ce n’est pas aujourd’hui que le vent de 3ème mandat, voire mandat illimité pour le président TALON a commencé à souffler et toutes les tractations sont en train d’être préparées pour y arriver, même si visiblement le bénéficiaire ne cesse de clamer partout qu’il veut être le bouton d’arrêt des 3èmes mandats en Afrique. Mais que peut-il si les textes de la République lui donnent cette prérogative constitutionnelle ? Comme nous l’avions vu au départ, il était venu avec le choix  personnel de faire un mandat unique afin de montrer qu’on peut réaliser par un seul mandat beaucoup de choses pour son pays. Mais les dispositions constitutionnelles et les fortes pressions psychologique, mentale et politique ont eu raison de sa volonté et le voici, réélu président de la République en 2021.

De tout ce qui se dit et que j’ai pu entendre ou lire, de toutes les dispositions de la Constitution et du code électoral, il y a un nœud gordien caché dont je n’ai pas entendu parler, et c’est le fusible constitutionnel qui permettra au président TALON d’être candidat éligible pour la présidentielle de 2026. Ce fusible réside dans le clair sombre de certaines dispositions du titre XII, des dispositions transitoires et finales de la Constitution révisée du 07 novembre 2019. Les grandes mutations de cette révision pour des élections générales en République du Bénin résident dans l’entièreté des dispositions de l’article 157 du titre XII, qui ont défini clairement les conditions de l’organisation des élections générales en 2026 et les mandats de chaque type de mandant à savoir, les conseillers communaux et municipaux, les députés et le président de la République. En ce qui concerne le président de la République, les dispositions du 1er alinéa de l’article 157-3 stipulent : « Les dispositions nouvelles concernant l’élection et le mandat du président de la République entrent en vigueur à l’occasion de l’élection du président de la République en 2021 ».

Au vu de cette disposition fusible, le président TALON peut bel et bien se présenter à l’élection présidentielle de 2026 s’il le veut, malgré toutes les contraintes de candidature contenues dans les articles 42 nouveau et 44 nouveau de la Constitution. Ce même article 157-3, dans son dernier alinéa a expressément remis le compteur des mandats des députés à zéro à partir des élections législatives de 2023. Ce qui a permis aux députés ayant déjà plus de 3 mandats à leurs actifs d’être éligibles pour les élections législatives du 08 janvier 2023 et la décision de la Cour constitutionnelle EL22-001 du 06 octobre 2022 les y a autorisés car, le dernier alinéa de l’article 157-3 stipule clairement que « les nouvelles dispositions régissant l’élection et le mandat des députés entrent en vigueur à l’occasion des élections législatives de 2023 ». Cette décision de la Cour constitutionnelle constitue déjà une jurisprudence et il en sera de même au moment venu, pour l’éligibilité de la candidature du président TALON en 2026, quelle que soit sa volonté de ne pas faire un 3ème mandat, mais qui ne serait qu’en réalité son second mandat constitutionnel, le compteur de mandat présidentiel étant remis consciemment ou non aussi à zéro à partir de l’élection présidentielle de 2021 qui constitue le 1er mandat constitutionnel du président Patrice TALON.

Face à tout ce qui précède et en vue d’une bonne organisation de l’élection présidentielle de 2026 dans la paix, le juge constitutionnel et régulateur des institutions et de leurs fonctionnements, doit dans l’urgence et sans délai s’autosaisir de ce dossier et situer les uns et les autres sur les dispositions de cet article 157-3 de la Constitution. A défaut de cette clarification du juge constitutionnel, les députés et le gouvernement doivent suivre le président de l’Assemblée nationale dans son ambition de faire réviser la Constitution, comme il l’a annoncée dans son discours d’investiture. Que vivement les députés se penchent par les voies réglementaires et constitutionnelles sur cet aspect de l’éligibilité de la candidature du président Patrice TALON à son 3ème et second mandat constitutionnel, et procèdent à une révision structurelle de la Constitution. Cette révision, qui doit être consensuelle avec la participation de toutes les forces vives de la nation, s’impose et est urgente afin de corriger quelques incohérences telles que, les contradictions notoires des dispositions des articles 41 nouveau et 50 nouveau avec celles du 3ème alinéa de l’article 157-3, dispositions relatives à l’exercice de la vacance de la présidence de la République (Vice-président et président de l’Assemblée nationale) et de revoir certaines dispositions qui freinent la démocratie béninoise et fragilisent le système partisan et la décentralisation. Les révisions tous azimuts et conjoncturelles des textes fondamentaux ne sont pas souhaitées dans une République, c’est pourquoi le législateur, les gouvernants, les politiques et la société civile doivent tous et ensemble œuvrer pour doter notre pays des textes  fondamentaux de qualité et durables dans le temps et dont les conditions de révision ou d’amendement doivent être fortement balisées et contraignantes; ceci pour épargner à notre pays  des textes de lois opportunistes et grégaires, des lois qui sont souvent sans conviction et qui se votent généralement dans la précipitation, ou à la limite « les yeux fermés ».

La paix, l’unité nationale et le développement harmonieux de notre pays doivent être le leitmotiv de tous les Béninois et Béninoises. C’est pourquoi, j’invite les honorables députés de la 9ème législature, le gouvernement et les sages de la Cour constitutionnelle à tout mettre en œuvre pour clarifier sans délai, les dispositions du 1er alinéa de l’article 157-3 de la Constitution, en vue d’un bon déroulement dans la paix des élections générales de 2026. Députés de la 9ème législature, votre crédo, la République du Bénin d’abord, /.

(Une analyse de GBEOUEZOUN Dorothé KOYOTE)

Source : Matin Libre

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