On l’appelait Docteur Kaolo

Rouler avec casque, rouler prudent.

Blewu, Blewu stop accident.

Alors que la CAN 23 s’est achevée en apothéose le dimanche 11 février avec une affiche de finale opposant deux équipes du côté Ouest du continent, c’est le souvenir d’une figure météorique ouest africaine dont la renommée n’a pas traversé les générations telle celle d’un Pelé, d’un Zagallo, ou d’un Laurent Pokou, qui visite notre mémoire, comme pour rappeler à notre conscience les tragédies qu’engendrent les accidents de circulation, brisant soudainement les trajectoires des destins. Les circonstances de la perte de Docteur Kaolo un dimanche de juillet 1972 mirent à l’époque au-devant de l’actualité un peu partout en Afrique les campagnes intensives pour le port du casque de protection en circulation.

Les échos des exploits de Edmond Apeti Kossivi alias Docteur Kaolo sur les stades togolais et africains ont accompagné nos enfances et nos adolescences. Nous ne saurions évoquer le souvenir de Dr Kaolo sans le relier à ces petites cartes avec photo de stars mondiaux de football que nous collectionnions et échangions à l’époque dans les cours de récréation. Ces cartes odorantes d’une fragrance alléchante accompagnaient les petits paquets de chewing gums que nous achetions sur les chemins de l’école primaire. Nous y trouvions des portraits en action de stars du football mondial, tels les brésiliens, Pelé indubitablement, qui éclairait de son aura les Rivelino, Jairzinho, mais aussi le légendaire joueur algérien Rachid Mekloufi, Eusébio le mozambicain-portugais, les français Juste Fontaine, Raymond Kopa, Roger Piantoni, le mythique gardien de but soviétique Lev Yachine et tant d’autres … Cependant notre rêve, notre expectative était de dénicher un jour ou l’autre pour nos collections des cartes à l’effigie des stars proches de notre aire géographique dont les échos nous parvenaient, tels Kalala du Congo, Pokou de Côte-d’ivoire, les Keita (Fantamadi et Salif) du Mali, Ibrahim Sory Keita alias petit Sory de Guinée, Mbappe Leppe du Cameroun etc. et bien sûr Docteur Kaolo, le mythique fin dribbleur de l’étoile filante de Lomé tout proche, faisant partie pour la plupart de la génération née dans les premières années après la fin de la seconde guerre mondiale pour laquelle un certain nombre de leurs géniteurs avaient été mobilisés. Dr Kaolo né en 1946 dans la région de Tsévié comme la diva togolaise Bella Bellow (1945), Dr Kaolo dont nous sûmes rapidement qu’il n’était pas médecin et que Kaolo n’était pas son vrai nom mais celui de la plume du stylo prisé, recherché par nos aînés et jeunes oncles et tantes des collèges et lycées. A ce sujet, je voudrais citer ces phrases tirées d’un article dont le lien apparaît en bas d’article :

  • « Il devient alors réputé et décrit comme un Docteur de par ses dribbles légendaires sur un terrain, sa qualité de buteur, sa rapidité et surtout sa finesse tel un chirurgien opérant ses patients et aussi en référence à un stylo de qualité connu sous la marque de kaolo. Tout ce mélange lui conféra ainsi son surnom de Dr kaolo.
  • S’octroyant l’occasion de divaguer quelque peu, les ouï dires de sa ville natale Tsévié le décrivent comme étant le meilleur dribbleur de tous les temps qui suite à un dribble laisse la marque « DK soit Docteur Kaolo » sur le sol tel un stylo apposant son encre sur une feuille. «

C’est de cette renommée que nous vint l’expression en langues nationales : « Il écrit les adversaires, il opère les adversaires » pour parler de Dr Kaolo et par extension pour décrire un joueur fin dribbleur.

Je voudrais surtout inviter le lecteur à lire à tête reposée en lien un résumé de la légende de Dr Kaolo telle que rapportée par le célèbre reporter sportif togolais dont la voix et le talent ont marqué les auditeurs et lecteurs de la région, je veux nommer Mr Benoît Messan Gnamey. C’est le lieu de rendre hommage aux talentueux journalistes qui ont su médiatiser et vivifier à travers le monde ces événements sportifs et leurs acteurs à divers degrés. On pense à nombre d’entre eux, Alex Chodaton, Mouf Liady, Diogo Pelu etc. au Bénin. L’inoubliable Thierry Roland, son confrère Jean-Michel Larqué etc. en France. Il convient que leurs contributions au monde sportif soient relevées et honorées de diverses manières. Car dans l’idéal ce ne sont pas des noms de figures extra sportives qu’on serait enchanté de voir au fronton des stades mais bien plus souvent ceux des vrais acteurs et de leurs médiateurs (Joueurs, coachs, staff technique, journalistes, reporters sportifs etc.). Car ils sont les créateurs de l’inspiration de la jeunesse.

De nos jours avec la professionnalisation du sport, un joueur n’inspire la jeunesse que par sa pratique sportive. Mais dans le temps, à l’époque où le statut de sportif était doublé d’une pratique professionnelle ou sociale, le modèle d’inspiration était souvent double, dual. Docteur Kaolo, travaillait à la CEET, la Compagnie togolaise d’énergie électrique à Lomé. Je me souviens d’un copain dont le rêve d’enfance était de jouer pour l’association sportive de Porto-Novo dès l’âge de 17 ans et de partir par la suite après son baccalauréat continuer des études de médecine à l’étranger (Dakar, Paris etc.) en espérant être convoqué pour rentrer occasionnellement avec Air Afrique jouer des matchs d’importance de l’Asso ou de l’équipe nationale, les écureuils, tout comme le faisait à l’époque sa star favorite Etienne Quenum, sociétaire de l’Asso et étudiant en médecine à Dakar. Ou cet autre copain d’enfance qui rêvait de faire des études d’agronomie tout comme Patrice Gbègbèlègbè, un talentueux attaquant de l’Etoile sportive de Porto-Novo. Je n’ai pas écho que l’un ou l’autre de ces deux copains aient fait des expériences en tant que sociétaires de clubs de foot, mais l’un et l’autre sont devenus respectivement Docteur en médecine et ingénieur agronome.

Puissent les acteurs et le public se rappeler que le football comme les autres disciplines sportives est un jeu et qu’à ce titre il participe du monde et du modèle d’inspiration de l’enfance et de la jeunesse, afin que les comportements entourant sa pratique aient valeur d’exemplarité. Ainsi pourra-t-on bannir les rudoiements et admonestations d’arbitres par des joueurs et des coachs énervés, les accrochages violents entre joueurs, les injures de toutes sortes aux alentours des stades etc.

Ainsi donc il ne faudrait pas que les masses d’argent que draine le monde du sport contemporain nous fassent perdre de vue certains principes cardinaux qui doivent régir et gouverner les comportements des acteurs à divers niveaux.

Pour terminer, rappelons qu’un bus transportant des journalistes couvrant la CAN 2024 en Côte-d’ivoire a subi le 24 Janvier un accident entre Abidjan et Yamoussoukro. Quel qu’en soit la cause et les circonstances rappelons-nous ce précepte cardinal de la circulation routière chanté par Bella Bellow : C’est Blewu, Blewu que nous arriverons tous ensemble à destination.

G. Théophile Nouatin

La légende de Apéti Edmond dit Dr. Kaolo – We Love Sport (welosport.com)

Togo : Son parcours, la CAN 1972, les circonstances de son décès, Messan Gnamey dit tout sur Dr Kaolo – L’Equipe Sportive (lequipe228.com)

Source : 24 HEURES AU BENIN

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