Bola Tinubu, président de la Cedeao contre les Coups d’Etat : 3ème mandat dans la sous-région, le nœud gordien


Bola Tinubu annonce les couleurs. Dans un discours musclé, le successeur du président de la Guinée-Bissau à la tête de la Cedeao a durci le ton contre les changements anticonstitutionnels. C’est dire qu’il donne priorité à la consolidation de la démocratie dans l’espace sous-régional. Il pointe du doigt les coups d’Etat qui ont eu lieu ces 3 dernières années au Mali, au Burkina Faso et en Guinée tout en promettant des actes forts pour endiguer le mal. Le discours est bien beau et a le mérite d’entretenir l’espoir d’un nouvel ordre dans la sous-région. Mais, il manque une épice à la soupe proposée par le nouvel homme fort de l’organisation et cela suscite une légitime interrogation. Suffit-il d’éradiquer les coups d’Etat pour que vive la démocratie dans l’espace Cedeao ? Car, il n’y a pas qu’un seul mal qui ronge, ce sont des maux qui minent l’Etat de droit dans l’espace Cedeao.

En réalité, les problèmes d’instabilité et de troubles qu’on observe au sein des Etats ne sont pas uniquement liés aux coups d’Etat. Ils sont également tributaires des ambitions de certains chefs d’Etat à briguer un 3ème mandat parfois au prix de bain de sang. D’ailleurs, les récents coups d’Etat n’ont pas fait autant couler de sang que lors des contestations liées aux perspectives de renouvellement pour un 3ème mandat. C’est fait souvent par forcing après avoir opportunément révisé la constitution et prétexté d’une remise de compteur à zéro. Au cours des trois dernières années, on a compté des morts en Côte d’Ivoire et en Guinée à cause de la question de 3ème mandat des présidents en fonction depuis 10 ans. Alassane Ouattara et Alpha Condé ont fait passer leurs ambitions comme une lettre à la poste et la pilule a été avalée sans aucune sanction dans l’espace Cedeao.

Du deux poids, deux mesures

Que de sanctions n’a-t-on pas prises contre le Mali, le Burkina et la Guinée à cause des coups d’Etat en oubliant le mal fait aux citoyens de ces pays. Ainsi, pour des péchés qu’ils n’ont pas commis, ils ont été obligés de boire le calice jusqu’à la lie. Pendant ce temps, dans des pays comme le Togo, aucune inquiétude n’est à signaler. Pourtant ce pays n’a pas jamais connu d’alternance démocratique et son président, Faure Gnassingbé qui est au pouvoir depuis 18 ans est à sa 4ème mandature à la tête du pays. Face à cette injustice notée, au nom de la souveraineté, les organisations sous-régionales ne trouvent rien à redire. Car, la constitution du Togo n’a pas limité les mandats donnant ainsi la latitude au président de se représenter autant de fois qu’il le désire. Dans ce contexte, le concept de la démocratie est interprété suivant le temps et l’espace. Ce qui est accepté dans un pays, peut être condamné dans un autre non loin. C’est en cela que les décisions des organisations sous-régionales comme la Cedeao sont mal perçues selon que l’on est dans un pays ou un autre. Elles s’apparentent à du « deux poids, deux mesures » et il est important de faire des réformes. Le nouveau président de la Cedeao qui souhaite consolider la démocratie ne doit pas se limiter à combattre uniquement les putschs. Bola Tinubu peut engager des réflexions en vue d’harmoniser les constitutions dans l’espace sous-régional. C’est ainsi que son vœu pourrait être réalisé pour une meilleure gouvernance en Afrique de l’Ouest. Sans cela, ce serait tout comme si Bola Tinubu prêchait pour sa propre paroisse et il ne serait point surprenant que l’écho de son discours ne dépasse pas le cercle des chefs d’Etats.

Ange M’poli M’TOAMA

Source : Fraternité

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