Dans les rayons des bibliothèques et librairies du Bénin: ‘’Le Salut Tumulaire’’ un palpitant récit pour la délivrance

(L’éducation sociale et la quête de la prospérité comme cibles)

‘’Le Salut Tumulaire’’ est un roman de l’écrivaine béninoise Sophie Adonon. Rendu public à l’occasion de l’édition 2022 du Salon National du livre déroulé au Palais des congrès de Cotonou, cet ouvrage dénonce, dans un style garni, libre et digeste, des faits de société tels que les jeux de hasard qui constituent le poison lent qui ronge les individus et des communautés familiales. 

 

‘’Le Salut Tumulaire’’ est une fiction dont le personnage principal est Norbert Lanmè, un fonctionnaire de classe A. Dans le récit, sa passion pour les jeux de hasard, notamment ‘’One X Bet’’ et ‘’Loto Sportif’’, l’a conduit dans un tel décor où il s’est retrouvé en désaccord total avec sa petite famille. Laquelle, l’a répudié en plein jour à coup de pierre et de bâton en pleine agglomération. Marié à plusieurs femmes, Norbert a très vite fait les frais de ses dépenses incontrôlées dans les jeux de hasard qui ne lui ont jamais garanti de jours heureux sauf si des gains minables frappent par pur hasard à la porte. Et pour même se relever de la misère désagréable que lui a causé sa passion effrontée, c’était pour le fonctionnaire Lanmè une mission presque impossible, sinon il y est resté stagné.

A y scruter de très près…

Le projet esthétique de cette œuvre riche d’environ 250 pages est clair: mettre la lumière sur ces passions tendancieuses, surtout les jeux de hasard, qui ruinent lentement le quotidien des citoyens. L’autrice a empoigné, dans un récit accrochant, le cas typique du personnage fictif Norbert Lanmè pour peindre le sombre et lugubre tableau de cette avalanche de personnes qui se font prendre au piège infernal chaque jour. A la première lecture de ce bouquin publié aux Editions ‘’Béninlivres’’ dirigées par Esckyl Agbo, on a tendance à croire que l’écrivaine a délibérément opté pour la promotion de ses jeux de hasard. Mais c’est quand on essaie de saisir l’esprit du texte au travers des scènes spectaculaires qui se sont produites entre Norbert Lanmè, ses enfants et ses femmes, qu’on se rend à l’évidence que c’est d’une dénonciation cinglante qu’il est question. « Mais qu’avez-vous à parlementer avec ce déchet humain, proféra celui qui semblait être l’aîné de la fratrie. Hors de notre vue, a-t-on dit, père indigne ! Tu n’es pas un père, t’es une vipère. Vas t’adonner à ta loterie sous d’autres cieux », peut-on lire à la page 16 du roman. Alors, pour peu qu’un père se livre aux jeux de hasard et tombe maladroitement dans l’incapacité de subvenir aux besoins incompressibles de sa petite famille, voilà le type de déchéance qu’il essuie lorsqu’une petite démêlée se déclenche à son propre domicile qu’il a construit avec son argent. Et la couleur attrayante de la première de couverture de l’ouvrage en dit long. Cette première de couverture se présente au lecteur avec la couleur orange vive appuyée par des effets de lumière du jour qui s’assombrit vers le bas avec en arrière-plan un géant arbre desséché et le titre inscrit en couleur blanche. C’est juste une sorte de similitude que l’autrice, en complicité avec son éditeur, a voulu apporter entre la joie éphémère que ces jeux de hasard apportent lorsqu’on gagne de petits sous et puis l’amertume dans laquelle on plonge lorsque le déclin, le dépit et toutes autres formes de situations malveillantes commencent par agresser le quotidien des accrocs. Ce livre est juste une invite à la prudence vis-à-vis de ces jeux afin d’en être délivré. Puisqu’« il n’y a rien de plus dangereux que la passion pour une réalité de vie que ça soit en amour ou dans les divertissements », fait savoir l’écrivaine Sophie Adonon elle-même.

Le Style…

Comme à l’accoutumée, on reconnait Sophie Adonon, enfin l’écrivaine très attachée à ses racines originelles à travers ce roman. Au détour d’un récit dans lequel le narrateur est resté dans la focalisation zéro, on sait tout du personnage qu’il met en scène. Sophie n’a pas manqué son art descriptif qui l’a conduite régulièrement  à mettre en relief la destination Bénin, ancien Dahomey, à travers la toponymie et l’anthroponymie. Dans les lignes de ce livre, on peut lire facilement des noms comme Kouhounou, Sinhoué Zounmey qui sont des noms de localité bien connues du Bénin et qui sont certainement utilisés exprès pour rapprocher davantage le lecteur de la réalité géographique. Ou encore, les noms comme Norbert Lanmè pour suggérer les patronymes significatifs que portent les enfants du Bénin.  ‘’Lanmè’’ pour traduire en langue fongbé «le jus dans le corps». Et il faut constater que le long du récit, c’est le personnage principal et il s’est bien familiarisé avec l’alcool, puis à cela s’ajoute sa passion pour les jeux de hasard qui constituent une autre forme d’excitant aux effets délirants. Ce récit satirique est rempli de rebondissement et de suspens.  Ce qui retient l’attention du lecteur qui peut bien le déguster d’un trait à cause de sa linéarité et sa fluidité.

        

Qui est Sophie Adonon ?

A l’état civil, Sophie Alfrède Clarisse Adonon est l’une des plus prolifiques écrivaines béninoises vivant en France depuis plus de 40 ans. Née en 1964 à Abomey, d’un père commandant de douanes, feu l’administrateur Officier Frédéric Adonon, elle est la fille aînée d’une fratrie de plusieurs enfants. Digne fille du plateau d’Abomey, Sophie Adonon a passé une grande partie de son enfance et de sa jeunesse dans les villes d’Abomey et de Cotonou pour y avoir fait ses études primaires et secondaires. En 1983 après avoir décroché avec brio son Baccalauréat, elle eut l’opportunité de prendre son envol pour la France qui aujourd’hui, représente carrément sa deuxième patrie après son Bénin natal. Première écrivaine à avoir produit le polar et à avoir écrit une pièce de théâtre en Alexandrin, Sophie Adonon force aujourd’hui l’admiration dans le monde de la littérature béninoise avec sa panoplie de publication. Entres autres sur près de la trentaine disponible sur le marché du livre: ‘’Le sourire macabre’’ (roman policier), ‘’Le plat qui se mange froid’’ (roman policier), ‘’Cœur insomniaque’’ (roman policier), ‘’Parole d’immondices’’ (roman policier), ‘’Pour une poignée de gombot’’ (roman), ‘’Le Hiatus’’(drame), ‘’Un trop lourd tribut’’(drame), ‘’Bitume fertile’’(roman), ‘’Assouka’’(Pièce de Théâtre), ‘’Adjoua et ses échelles’’(recueil de nouvelle), ‘’Le salut Tumulaire’’ (roman), le dernier en date, pour ne citer que ces ouvrages. Titulaire d’une maîtrise en Droit Privé, option pratique et contentieux, l’écrivaine est très attachée à sa culture d’origine ce qui l’amène très souvent à y faire un clin d’œil à travers ses ouvrages par le biais des toponymies et anthroponymies très prononcées. Elle n’hésite pas à mettre des noms repérables de localité dans l’ultime quête de mettre en relief la destination Bénin.

Teddy GANDIGBE

Source : Matin Libre

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