Présidentielle de 2026 au Bénin: Les conditions capitales à réunir pour prévenir le scénario  »wahala »

(A moins de 3 ans de ce tournant de l’histoire, où en sommes-nous ?)

Les élections générales de 2026, notamment la présidentielle, cristallisent de plus en plus les attentions. Quand on se souvient que sous le pouvoir de la Rupture, les législatives et la présidentielle organisées en 2019 et 2021 ont été sources de tensions et de crises avec à la clé des morts, des blessés, des dégâts matériels et des centaines de personnes encore en prison,  et quand on sait également que relativement à la gouvernance de Patrice Talon des revendications, propositions ou doléances quant aux sujets qui fâchent sont restées jusque-là sans suite alors qu’elles constituent des conditions capitales à réunir pour bien négocier cet autre tournant de l’histoire du Bénin, n’il y a-t-il pas lieu de se demander ce qu’il en est à moins de trois ans de l’échéance?

 

  Nul n’ignore qu’en dépit de la brouille et des relations devenues glaciales entre l’ancien chef de l’Etat Yayi Boni et Patrice Talon qui avait, in fine, opté pour l’exil entre 2012 et 2015, l’opérateur économique suite au pardon dont il a bénéficié de son ancien ami au pouvoir, a fini par rentrer au Bénin. De retour de Paris, Patrice Talon et ses hommes vont réussir en 2016 à prendre le pouvoir face Lionel Zinsou, ancien premier ministre, candidat de Yayi Boni. Dans la paix et sans effusion de sang, l’alternance au sommet de l’Etat s’est faite ; le chef de l’Etat sortant a passé le témoin à son successeur et ‘’ennemi’’ le jour constitutionnellement défini pour la prestation de serment. Le Bénin à nouveau venait d’étonner le monde par cette belle page démocratique inscrite dans son histoire politique. Les Béninois épris de paix et de démocratie ne pouvaient rêver mieux. Mais, alors que le pouvoir de la Rupture avait suscité d’enthousiasme et d’espoir à cause des monts et merveilles promis au départ, les populations déchantent au fil des ans. La gouvernance a péché sur plusieurs plans. Que ça soit du point de vue économique, politique et social, les tâches noires sont évidentes. Les pages lugubres des crises engendrées par les élections exclusives de 2019 et 2021 sont encore vivaces dans les esprits. Jamais par le passé, un pouvoir au Bénin n’avait connu autant de morts, de dégâts matériels et de prisonniers en temps d’élections autrefois des moments de fêtes. Les exilés, il y en a aussi beaucoup. Des désertions pour entreprendre dans des pays limitrophes à cause des conditions au Bénin, les noms cas de licenciements dans l’administration, les victimes des opérations de déguerpissements, les fractures au plan social, la liste n’est pas exhaustive. Au regard de tout ça, pour aplanir les divergences, revoir le vivre ensemble et prévenir un tel scénario aux conséquences incommensurables et douloureuses,  des voix se sont élevées pour supplier, faire des propositions ou doléances, d’autres pour revendiquer ou exiger la libération de toutes les personnes (personnalités, élèves, étudiants et autres) interpellées condamnées ou non pendant les périodes des élections exclusives, à l’instar de Réckya Madougou, Joël Aïvo. Outre cela, la prise d’une loi d’amnistie en leur faveur, le retour de tous les exilés politiques, avec en apothéose l’organisation d’un dialogue national inclusif. Autant de points sur tapis qui tiennent à cœur non seulement à l’opposition, mais aussi à beaucoup d’autres acteurs politiques, de la société civile aussi bien au pays que de la diaspora. Régler ces préalables pourrait permettre de régler plusieurs problèmes connexes : la peur, la perte de responsabilité des forces vives, l’immobilisme et le silence de la classe politique visiblement tétanisée, la corruption et les crimes économiques qui se révèlent davantage ces derniers mois-ci ; la question de conflits d’intérêt. Régler ces préalables, c’est aussi pallier les exclusions économiques qui détruisent le tissu productif, etc. Pour ce faire, les trois années à venir, la République devra changer de dimension ou de paradigme en optant pour un nouveau cadre institutionnel inclusif. De là, les doutes liés à la transparence des élections, la crédibilité des institutions de contrepouvoir ou de régulation pourraient être levés. Le pardon et la réconciliation nationale que beaucoup appellent et attendent de tous leurs vœux pourraient devenir également une réalité. Toutes choses qui épargneraient davantage le Bénin des violences et leurs corollaires. Dans ce changement de dimension, d’autres pensent carrément à un changement de registre en parlant de la rupture de la Rupture estimant qu’un choix bien réfléchi à l’avenir, en voulant élire les dirigeants règlerait beaucoup de choses. Dans la balance, pour y arriver, on met en avant les considérations ou critères comme la connexion avec la foi en Dieu, l’amour pour Dieu et pour autrui, le sens des responsabilités et la refondation spirituelle, éthique morale, la démocratie de la politique, de l’économie et du social ainsi que de la sécurité à prendre en compte pour empêcher le navire Bénin de couler.

Bien négocier le tournant de 2026, c’est aussi…

Avec toutes ces attentions déjà portées sur cette présidentielle de 2026, l’autre question qui cristallise toutes les attentions, c’est celle de mandat excessif. Le Bénin depuis le Renouveau démocratique ayant toujours été un bon élève sur ce plan, sera face à l’histoire à ce tournant. Alors que ça se passe comme un effet de contagion sur le continent, il faudra à tout prix éviter les appétences du troisième mandat. Même si le chef de l’État à travers la révision de la Constitution de 2019 a bétonné ce volet et réaffirmé plus d’une fois qu’il n’ira pas au-delà des deux mandats constitutionnellement établis, des craintes demeurent chez certains observateurs. Bien négocier ce tournant, un challenge pour le pouvoir de la Rupture, c’est déjà ne pas s’embourber dans le piège du dauphinat mal pensé, éviter la gouvernance de l’exclusion, rassurer quant à la lutte contre les malversations qui s’enracinent dangereusement dans l’administration publique sous un pouvoir sensé rompre avec ces pratiques ; c’est éviter également les conflits d’intérêts au sommet de l’Etat et bien d’autres problèmes qui fâchent sur les plans politique, économique et social et qui durent depuis 2016. En clair, les actes à poser doivent contribuer à davantage rassurer le peuple pour les moins de trois ans qu’il reste pour Patrice Talon et son système. En tout cas, nul ne sera de trop dans la construction ou l’édification de la nation Bénin. Tous les filles et fils du pays, quel que soit leur appartenance politique, religieuse, ethnique ou quel que soit là où ils se trouvent sur la planète, ils sont concernés. Pour resserrer les liens, repartir sur de nouvelles bases comme à la Conférence des forces vives de février 1990, les Béninois ont besoin de se voir, de se parler, de se vider et de se serrer les mains. Cet exutoire est capital pour guérir et prévenir plusieurs maux (wahala, en langue nationale).

Mike M.

Source : Matin Libre

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